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Rencontre avec un “Ironman” : la compétition se règle aussi dans l’assiette

Participer aux championnats du monde d’Ironman n’est vraiment pas une mince affaire. Pour enchaîner 3,8 km de natation, 180,2 km de cyclisme et un marathon en course à pieds et ce parfois en altitude, sous de fortes chaleurs ou dans des zones humides, l’homme doit vraiment être « de fer ». Adapter ses apports nutritionnels est presque tout aussi important qu’un entraînement assidu.

 

Efficium a recueilli l’avis de Nicolas Boivin, finisher en un peu plus de 10h des championnats du monde d’Ironman à Hawaï et de sa nutritionniste Virginie Terrier.

Pourquoi t’es-tu intéressé à la nutrition pour cette compétition?

Nicolas : La nutrition est venue pour moi d’un simple constat. Il m’était facile de performer sur des épreuves de 2H mais dès que j’allongeais la distance sur 4-5h il apparaissait un constat d’échec dans l’une des 3 disciplines que je pratique et qui représente le triathlon. A partir de là j’ai su qu’il fallait que je prenne en main mon alimentation, chose que je repoussais à chaque fois. Ma rencontre avec Virginie Terrier, micronutritionniste a été le facteur déclenchant. Le hasard fait parfois bien les choses.

Quels ont été pour toi les gros changements dans ton alimentation ? Ceux-ci t’ont-ils paru contraignants?

Nicolas : A l’issue de mon premier bilan avec ma nutritionniste, on s’est rendu compte que j’utilisais anormalement mes graisses à l’effort et qu’une carence en oméga 3 entrainait une difficulté pour les nutriments à franchir ma barrière cellulaire. Et puis, je ne mettais que de l’eau dans mes gourdes et du coup mon organisme puisait dans le peu d’omégas 3 que je consommais pour trouver de l’énergie. Virginie m’a conseillé une alimentation riche en oméga 3 pour rétablir l’équilibre entre mes acides gras : une boîte de sardines ou autre poisson gras tous les midi, associée à une complémentation et la suppression du beurre remplacé par des huiles riches en omega 3. Le plus gros changement a été l’introduction de substrats (sirop ou jus de pommes) dans mes gourdes pour tout effort de plus de 45 min. Je dois avouer qu’il me reste encore des progrès à faire dans les boissons de récupération et que je ne suis pas encore très assidu mais il faut du temps pour prendre les bonnes habitudes, plus que les mauvaises.

Penses-tu que la nutrition Ironman-nutritionest un facteur important dans l’évolution des performances?

Nicolas : D’abord je remercie Virginie pour son travail et ses conseils. Elle a même pris l’initiative de venir avec moi sur les lieux de mon objectif que représentait les championnats du monde Ironman à Hawai et s’est rendu compte de l’impact de la chaleur et de l’humidité pour faire face auxquelles elle a adapté mon alimentation sur place. Pour répondre à la question, aujourd’hui avec l’évolution des niveaux et des performances on s’aperçoit que la nutrition avec un niveau d’entrainement certain est indispensable pour être le plus performant sans baisse de régime. Pour parler de mon cas personnel, au fur à mesure des mois de préparations qui s’écoulaient, du volume horaire d’entraînement qui augmentait et en appliquant les conseils de Virginie, j’ai pu remarquer que les baisses de régimes au cours de sorties longues ont nettement diminué, et que sur chaque entrainement journalier les traces des séances de la veille étaient beaucoup moins présentes. Par rapport à la température et à l’humidité, Virginie m’a ainsi alerté sur l’importance de la concentration en substrat en fonction de la chaleur. En cas de forte chaleur on diminue les concentrations; inversement par temps frais. Le but est maintenant d’évoluer sur une préparation complète pour l’année prochaine alors au boulot et merci Efficium!

Virginie, la nutrition semble indispensable, quel est ton avis ?

Virginie : La préparation nutritionnelle à une épreuve de longue distance est un travail de haute précision et de longue durée. Effectivement, le lien entre alimentation et performance ne se joue pas à quelques jours de l’épreuve mais des mois avant. Ce travail demande une bonne compréhension et beaucoup de régularité, tout comme l’entraînement sportif. L’idéal pour préparer une telle compétition est de s’y prendre au moins 6 mois au préalable, ce qui permet de faire un bilan nutritionnel et biologique poussé, de mettre en place une stratégie nutritionnelle et d’en vérifier l’efficacité par un second bilan biologique. Les épreuves longue distance représentent un traumatisme physiologique et demandent à notre organisme de s’adapter: déstocker et récupérer plus vite, augmenter les processus de réparation cellulaire, compenser les carences. Il arrive souvent aussi que l’organisme n’y parvienne plus, on parle alors de désadaptation a l’effort. Dans ce cas les performances seront en baisse et associées à un état de fatigue injustifié.

Quels sont les problèmes les plus fréquemment rencontrés chez les sportifs de longue distance ?

Virginie : Les sportifs de longue distance peuvent rencontrer de nombreux troubles et notamment des troubles intestinaux provoquant des effets à distance. A l’arrêt de l’effort notre sang chargé de déchets se déverse massivement dans notre intestin, qui est alors agressé, on parle de phénomène d’ischémie/reperfusion. Plus ce phénomène se reproduit, plus les jonctions entre nos cellules intestinales vont s’abîmer pour entraîner ce qu’on appelle l’hyperpermeabilité intestinale, l’intestin devient une passoire. Dès lors plusieurs troubles digestifs et extra digestifs peuvent subvenir : inconfort, ballonnement, diarrhées, constipation, mais aussi fatigue chronique, douleurs musculaires anormales. Afin de limiter ce phénomène, la prise d’une boisson de l’effort est capitale, sa composition devra cependant varier en fonction du type d’effort et de la température extérieure. Il est également fréquent que les sportifs présentent des carences en acides gras spécifiques, les omegas 3. Les omégas 3 ne sont pas des graisses de stockage, ils constituent préférentiellement nos membranes cellulaires et jouent un rôle clé dans la résolution des inflammations et les échanges entre nos cellules. Lors d’épreuves ou entraînements longue distance, les substrats énergétiques s’épuisent vite (glucides, lipides, protéines.), ainsi, lorsque les apports alimentaires à l’effort ne sont pas suffisants, les omégas 3 peuvent être utilisés comme substrats.Nos membranes cellulaires « se dessèchent » et deviennent alors rigides. Certains troubles peuvent survenir : inflammations chroniques (tendinites), troubles de la mémoire et de la concentration, troubles cardiovasculaires. Certaines études ont également montré que chez les sportifs de haut niveau des carences accrues en omégas 3 peuvent provoquer des “morts subites” lors des épreuves de longues distances. La rigidification cellulaire peut donc aller jusqu’à l’arrêt cardiaque, il ne faut pas le prendre à la légère.D’autres troubles comme les carences ou excès en micronutritments, réactivations virales (herpès) à l’effort, troubles de l’équilibre acido/basique et blessures fréquentes, sont également très fréquents et peuvent largement influencer la performance.

Rappelons qu’il est souvent inutile et même parfois risqué de se complémenter a tort. Chaque complémentation et notamment chez le sportif doit donc être réfléchie avec l’appui d’une anamnèse symptomatique ou de bilans biologiques. Un nutritionniste spécialisé en micronutrition pourra aisément aiguiller les sportifs vers un changement alimentaire et une complémentation adaptée.

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